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23 September 2021


Le géant, la girafe, l’asperge. Si l’on retient surtout sa taille énorme, on oublie souvent que Courtois est un gardien mal aimé et fort de caractère. Décrié à son arrivée au Real, Thibaut Courtois n’a jamais eu mince affaire, reprenant le flambeau d’un Navas triplement champion d’Europe. Plus que ça, il a subi une déferlante, désigné comme le bouc émissaire d’un club en fin de cycle et d’une saison 2018/2019 pas au niveau de la Maison Blanche. Mais voilà, Courtois, c’est également 1m99 d’abnégation. Si certains le critiquaient pour ses défauts effectivement visibles lors de sa première saison à Madrid, le gardien belge a répondu par son travail. Et pour Thibaut, le travail a payé.

Depuis deux saisons, les performances du géant belge l’ont propulsé sur le toit de l’Espagne. Le trophée Zamora de meilleur gardien (malgré la concurrence de deux prétendants au titre de meilleur gardien du monde lors de la même période) et une Liga en poche, il affiche une progression assez irréelle pour un gardien de son âge. Alors, une question se pose. Si le portier belge a confirmé comme l’un des meilleurs gardiens du monde, quel sera son statut dans quelques saisons ? C’est la question à laquelle nous allons tenter de répondre dans ce premier épisode de MO Opposé.

Confirmé mais ébranlé

Thibaut Courtois, c’est un visage du foot européen qui a traversé les époques. Si le gardien belge est connu de tous les amateurs de football, c’est qu’il a réussi à s’imposer à un âge extrêmement précoce dans les grandes écuries européennes. De par sa taille mais également sa technique, le cavalier Courtois a su devenir une référence du poste et ce à un âge où la plupart des gardiens sont relégués au rang de doublure dans les grands clubs ou jouent dans des équipes de seconde division. À 19 ans, Chelsea détecte la pépite à Genk après un championnat de Belgique remarquable où il gagnera son premier titre avec les pros. Une fois l’étalon acquis, il est envoyé galoper à Madrid en tant que successeur de De Gea, rien que ça.

Et le moins qu’on puisse dire, c’est que son mètre 99 a été à la hauteur. Trois ans plus tard, l’Atletico est passé d’un club secondaire du championnat d’Espagne à champion en 2014 du pays qui dominera l’Europe pendant 5 ans. Glanant au passage une coupe du Roi et à 2 minutes et 12 secondes près d’être champion d’Europe la même saison, la faute à un coup de casque de Sergio Ramos. Ses performances convainquent, impressionnent (76 clean sheets en 125 matchs) et il est rapatrié par les Blues pour succéder à Petr Cech, excusez du peu. S’en suivent quatre saisons pleines où le belge remportera deux fois la Premier League, sûrement le championnat le plus contesté d’Europe, en ayant remporté en prime les deux coupes nationales.

Thibaut Courtois vainqueur de la Premier League en 2015 (crédit : Eurosport)
Thibaut Courtois vainqueur de la Premier League en 2015 (crédit : Eurosport)

Mais voilà, courtisé par le Real Madrid dont il est fan depuis sa plus tendre enfance, Thibaut saisit l’opportunité et repart à Madrid pour rejoindre la Maison Blanche, triple championne d’Europe.

Peur de rien, pas même de succéder à l’idole des fans Keylor Navas, il est accueilli froidement par une afición qui voulait garder son chouchou costaricien. Et les débuts ne sont pas glorieux. Si la méforme de l’équipe en 2018-2019 est certes due principalement à une fin de cycle mal gérée, le portier belge ne touche pas les étoiles, loin de là, la pression n’aidant sûrement pas.

Au-dessus des doutes et des faiblesses

Car faire 1m99 ne présente pas que des avantages. Si sa taille et son envergure sont des atouts de taille pour le poste, Courtois a malheureusement peiné à les utiliser à bon escient lors de sa première saison. Une ribambelle de buts où, à cause d’un timing et d’un rythme pas dans l’action, “Tibu” a encaissé des duels sous ses longues jambes. Ces actions qui nous sont tous arrivées, Thibaut en a connu trop lors de cette saison. De même, son jeu au pied n’aidait alors pas à le sublimer comme le gardien impérial que cherchait le Real. Les critiques fusent, autant de par la presse que des supporters (8 clean sheets en 27 matches), mais Thibaut se fait petit, pour une fois, et travaille dur.

Après une saison compliquée, c’est une saison de renaissance qui se dresse devant le géant belge. Le Real se doit de réagir, et le fait. Malgré une saison coupée par la pandémie pendant plusieurs mois, le gardien merengue réalise des performances à la hauteur de son talent. Surtout, il a gommé les erreurs qu’il avait tant commises la saison passée,  signe que la confiance et le travail ont porté leur fruit. Un jeu au pied plus rassurant, pourtant un secteur très difficile à améliorer, des duels remportés à la louche. Exit les petits ponts, bonjour les sorties bien senties. Adieu les relances hasardeuses, bienvenue aux passes lasers vers Toni Kroos et comparses. Boosté par une superbe performance en Supercoupe d’Espagne où il est le facteur X pendant la séance de pénaltys, Tibu est tout simplement une montagne imfranchissable, comme si les ballons étaient attirés par ce gigantesque corps se dressant devant une cage devenue si petite. Meilleure défense du championnat, le Real remporte la Liga et Courtois un trophée Zamora qui vient récompenser une fin de saison tonitruante. Même en Champions League, le portier belge fait des miracles, mais Manchester City est malheureusement trop fort pour la Maison Blanche.

Et ces performances continuent la saison d’après. Malgré une équipe du Real qui trébuche énormément et laisse filer l’Atleti, Thibaut est la valeur sûre. Un meilleur pourcentage d’arrêts que Jan Oblak, pourtant pas le plus mal loti de ce côté là, et 17 clean sheets en 38 matches de Liga, une Liga qu’il aura gardée vivante jusqu’au bout du bout. Les saisons filent et se ressemblent pour Tibu qui est adulé par les supporters merengues, en témoigne son excellente performance lors de la première journée de Champions League cette saison contre l’Inter. Thibaut a confirmé, est devenu roi à la Casa Blanca et est toujours aussi impressionant en sélection, où il est indéboulonnable.

Toujours plus haut ?

Si Thibaut a sûrement vécu énormément de choses dans sa vie, il a rarement dû être sous quelque chose. Pourtant, la question se pose, le belge est-il sous-côté ? Très charismatique en Espagne, en témoignent les nombreux lives Twitch réalisés lors du confinement de 2020 où il montrait une facette de lui-même que peu connaissaient, Tibu souffre sûrement d’un manque de reconnaissance à l’international. Pourtant, son palmarès et ses performances parlent pour lui. Et la question qu’on se pose, que lui-même a dû se poser plusieurs fois : qu’en serait-il si le destin n’avait pas choisi cette tête de Sergio Ramos ? Un gardien qui emmène un Atletico certes prometteur mais alors nourrisson de l’Europe vers un premier sacre de son histoire, qui pourfend la Decima de l’éternel rival encaissant seulement 6 buts en 11 matchs avant cette fameuse finale, éliminant le club à qui il appartient et le Barca de Messi, et tout ça au plus haut niveau européen ? Un gardien qui réalise des prodiges avec la génération dorée belge, élu meilleur gardien du mondial 2018, et qui est un leader des Diables Rouges depuis bien des années ?

Il faut le dire, Tibu a des arguments à faire valoir. Alors oui, le sacre européen lui échappe encore, mais avec un Real en reconstruction et ses plus belles années devant lui, rien ne dit que cela ne dure très longtemps. Les statistiques pointent déjà vers lui comme le meilleur gardien de Liga depuis deux ans, en tout cas par les chiffres (pourcentage d’arrêt), certes aidé par une belle équipe madrilène, mais rien n’empêche. Lorsque le belge n’était pas à la hauteur, tout le monde ne voyait que lui. Maintenant qu’il est immense, il semble injustement ignoré. Et la génération dorée belge n’a pas dit son dernier mot non plus.

À son arrivée au Real Madrid, Courtois a fait passer un message très clair à Ramos : “Tu me dois une Champions League”. Si la légende madrilène est partie au PSG cet été, Courtois n’a plus que lui-même pour se faire vengeance. De toute façon, Tibu a toujours été plus fort que tout. Les critiques des supporters des Blues, des madridistas, des colchoneros. Les critiques de la presse. Les injustices qui lui ont été faites. Les désillusions qui auraient abattu le plus courageux des hommes. Alors pourquoi pas ? Pourquoi ne pas aller chercher ce titre européen ? Pourquoi ne pas aller chercher ce titre en sélection ? Pourquoi ne pas aller chercher ce Saint-Graal qu’est la reconnaissance ? Après tout, qui la mérite plus que lui ? Un mental de champion, un bosseur extrême, une capacité d’amélioration inégalée sur les deux dernières années, un gardien qui n’a plus aucun point faible. Oui, beaucoup savent que Courtois est grand, mais peu osent affirmer que Courtois est très grand, et peut-être en passe de devenir le plus grand gardien de son époque.

Courtois exultera-t-il bientôt ? (Source : GettyImages)
Courtois exultera-t-il bientôt ? (Source : GettyImages)

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photo de couverture : Twitter

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