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2 March 2023


Si le mathématicien William S. Anglin soutient que « les mathématiques ne sont pas une marche tranquille sur une autoroute dégagée, mais un voyage dans un désert étrange où les explorateurs sont souvent perdus », Victor Hugo affirmait quant à lui que « bien lire l’univers, c’est bien lire la vie ». Aussi, à l’instar de Richard Burton pour qui « l’instant le plus heureux d’une vie humaine est le départ vers une terre inconnue », partons ensemble à travers l’univers des portiers, à la découverte de l’autre dimension du gardien de but. Une dimension qui fait de lui un être à part certes, mais également un joueur à part entière dont le rôle est d’une complexité toute autre de celle de ses coéquipiers sans gant.

Ainsi, de la philosophie au football, du football aux mathématiques, se dessine sous nos yeux un trait d’union que l’on ne peut désormais plus ignorer. Un trait d’union donné par le langage, celui de la passe, celui-là même qui, lorsqu’il est joué par les musiciens d’un chef d’orchestre comme Pep Guardiola pour ne citer que lui, vibre et résonne comme la plus belle des symphonies. Un langage avec une couleur, une sensibilité, une beauté intrinsèque et si profonde qu’elle est une ode au football et à la vie, un merveilleux trésor.

Si l’on s’intéresse de près au football, les joueurs de champ évoluent en 2D, en deux dimensions. Une première offensive lorsque l’équipe a le ballon, lorsqu’elle est en possession de celui-ci, une autre défensive dans le cas contraire, lorsque l’équipe ne possède pas la sphère. Deux phases, l’une offensive, l’autre défensive, les joueurs évoluent donc bel et bien en deux dimensions pour remplir leur mission. Mais où est donc la différence, pourtant si grande, avec les gardiens de but ? Ne sont-ils pas confrontés eux aussi à ces phases offensives et défensives ? Bien évidemment, mais en réalité, les portiers n’évoluent pas dans un univers en 2D, mais en 3D. Les gardiens sont en trois dimensions, et c’est là toute la complexité de leur mission.

Car oui, le gardien de but est offensif et devient le 11e joueur de champ lorsque son équipe est en possession du ballon. Par sa capacité à être juste, à être dans le bon espace au bon instant, tant pour créer un angle de passe que donner un rythme à l’action, il est à même d’apporter la supériorité numérique à son équipe en l’aidant à se libérer de la pression pour mieux relancer, pour mieux se relancer face à l’adversité. Oui, le gardien de but a, comme les joueurs, un rôle défensif, mais celui-ci est plus complexe que pour ses coéquipiers car en réalité, il comporte deux aspects. Deux actes défensifs bien distincts qui le font évoluer de la 2D du joueur de champ vers la 3D du portier.

APPRIVOISER UN UNIVERS MECONNU

Le premier de ces deux actes est la défense d’un espace. Lorsqu’il est dans cette configuration, le gardien de but est, comme ses coéquipiers, sur un plan horizontal. Il défend un espace dans lequel il tentera de se saisir du ballon avant que l’attaquant ne puisse le faire. Le second, dont la responsabilité n’incombe qu’au portier, n’est autre que la défense d’un plan vertical plus communément appelé le but. Deux actes défensifs, l’un horizontal, l’autre vertical, deux actes auxquels s’ajoutent un acte offensif précédemment cité, les portiers évoluent donc bien dans un univers en 3D, et c’est là toute la complexité et l’unicité de la fonction que le football leur a attribuée sur le pré.

Car lorsque l’on parle offensivement du langage de la passe, d’un angle de passe, du temps de passe, la transition défensive entre ces deux instants peut être d’une extrême rapidité pour le portier. De la défense d’un plan horizontal, c’est-à-dire d’un espace, à la défense d’un plan vertical, c’est-à-dire le but, quelques dixièmes de secondes, voire moins, représentent parfois, même souvent, tout le temps dont dispose le gardien pour lire, comprendre et s’adapter à l’équation posée par l’adversaire qui, peu à peu, se rue vers ses filets. Telle est la clé de la haute, très haute performance du portier, celle qui mène vers l’excellence, mère de tous les succès.

LE GARDIEN PENSE, IL EST

Comme Descartes, père du nouveau point de départ de la philosophie selon laquelle il convient de penser le monde à partir du sujet qui le voit et non directement sans tenir compte des capacités à penser du sujet pensant, il nous faut aujourd’hui pousser la réflexion sur cette notion de trois dimensions à l’ensemble du football, à cet univers qui s’est petit à petit ouvert au gardien de but, en atteste l’évolution des lois au cours des 20 dernières années qui a fait progresser le football de manière vertigineuse. Grâce à celle-ci, nous avons pu comprendre que le gardien, bien qu’il ne porte pas les couleurs qu’il défend, est un joueur à part entière de son équipe et a autant une capacité de créativité en phase offensive qu’une capacité, une fermeté et une intelligence tactique pour essayer, avec l’aide de ses coéquipiers, d’inhiber toute forme d’action dans l’adversité.



Article co-écrit par Thierry BARNERAT, instructeur FIFA & Benoît TISSIER, rédacteur en chef de Main Opposée – Copyright – All rights reserved – 1er Mars 2023

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