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30 July 2021


Gardienne internationale, Méline Gérard a posé ses bagages au Bétis Séville en 2019 avant de rejoindre cet été la Casa Blanca du Real Madrid. Contactée par Main Opposée avant son transfert dans la capitale espagnole alors qu’elle défendait encore les buts andalous, elle revient sur sa carrière, son expérience, la philosophie du poste en Espagne et la marge de progression pour les gardiennes. Première partie d’un riche entretien.

Main Opposée : Bonjour Méline, comment se déroule cette saison avec le Bétis ?

Méline Gérard : On a très mal démarré avec plusieurs défaites consécutives. Depuis quelques matchs, on renoue avec la victoire. On ne sort pas encore la tête de l’eau, nous sommes encore dans les quatre derniers mais nous sommes revenues un peu de loin en recollant au classement.

(NB : En espagne, les 4 derniers descendent. Le Bétis est finalement parvenu à se maintenir à la faveur d’une 14e place en championnat.)

Où se place le Bétis Séville dans la hiérarchie du foot féminin espagnol ?

C’est compliqué à dire car le Bétis n’a pas fait énormément de saisons en première division. L’année dernière, avec le covid-19, ça a été difficile de juger. Lors de leur première année en première division, je crois que le Bétis avait terminé 6ème. C’est plutôt un club de milieu de tableau.

L’objectif du club, c’est le maintien désormais?

Maintenant oui, mais ce n’était pas l’objectif initial. On visait le haut du classement, au moins dans les huit voire les six premiers. Vu la tournure des choses, l’objectif du club est de se maintenir en première division. Au vu du recrutement et des investissements du club en début de saison, c’est vrai, c’est décevant.

Personnellement, comment tu te sens au Bétis Séville ?

Ça se passe très, très bien ! Je suis titulaire et je joue tous les matchs. J’apprends énormément tactiquement car le championnat est différent de ce que j’ai pu connaître en France. J’ai aussi de très bonnes relations avec mon entraîneur des gardiens et mon entraîneur principal.

“Je suis passée très rapidement de la DHR à la D1”

Pourquoi as-tu décidé de rejoindre l’Espagne en 2019 ?

J’ai eu une blessure importante à Montpellier, avec une hernie discale qui s’est transformée en sciatique. Cette blessure m’a immobilisée pendant quasiment un an et demi. J’ai voulu me relancer en quittant le championnat de France où on me connaissait énormément. J’avais besoin de vivre une expérience à l’étranger. Sur le plan humain, je voulais découvrir un nouveau pays et une nouvelle langue. Quand l’offre du Bétis est venue, je me suis dis que ça pourrait être le club parfait pour me relancer.

Tu débutes le foot à Massy puis à Montigny, avant de débuter ta carrière en D1 avec le PSG puis de revenir à Montigny. Comment se déroule tes débuts dans l’élite ?

Ma première année avec le PSG, c’était moyen. Je ne jouais pas tous les matchs. J’avais 17 ans, j’étais encore à Clairefontaine où je m’entraînais la semaine, et le week-end je jouais avec le PSG. Je n’avais pas forcément mes repères. Je suis passé de la DHR à la D1 d’un coup, ça m’a fait tout drôle ! C’est pourquoi je suis retournée à Montigny qui jouait en D2. Avec Montigny, nous sommes montées donc j’ai pu connaître le haut niveau. D’années en années, je me suis épanouie dans cette division.

Comment gère-t-on cette pression quand on est titularisée à 17 ou 18 ans ?

En toute honnêteté, à l’époque c’était très différent. Plusieurs joueuses de 17 ans jouaient en première division, le niveau n’était pas le même qu’aujourd’hui. C’était beaucoup de stress parce que je suis passée très rapidement de la DHR à la D1, je n’étais pas forcément préparée à ce niveau. À Clairefontaine je côtoyais le haut niveau car à l’époque il n’y avait qu’un seul pôle France, donc la semaine je m’entraînais avec des filles de haut niveau. Le fait de m’entraîner à Clairefontaine a été bénéfique pour moi.

Après la descente de Montigny en 2010, tu rejoins l’AS Saint-Etienne où tu restes pendant quatre saisons et remportes le Challenge de France en 2011. Que retiens-tu de ton parcours chez les Verts ?

C’était quatre années de folie parce qu’on était un groupe de copines. Dès ma première année, je gagne la Coupe de France qui s’appelait à l’époque le Challenge de France. Lors de ma troisième saison, nous faisons une deuxième finale de Coupe de France. Quatre années d’expérience au cours desquelles je me suis épanouie en tant que titulaire, j’ai pris du plaisir. J’ai vraiment lancé aussi ma carrière en tant que professionnelle. Je n’ai que des bons souvenirs de mon passage à Saint–Étienne.

En juin 2014, tu rejoins l’OL pour être la doublure de Sarah Bouhaddi. En signant à Lyon, tu rentres dans une nouvelle dimension….

Oui. En plus, lors de ma quatrième saison avec Saint-Étienne, j’avais été convoqué pour un stage en équipe de France qui était mon principal objectif. Je devais passer un pallier et on ne va pas se mentir, quand Lyon propose de te signer, tu ne peux pas refuser. C’est sûr que je passe dans une autre dimension car je ne t’étais pas professionnelle avant et je le deviens en signant à l’OL, dans le meilleur club du monde. J’ai appris, j’ai progressé et je me suis parfaitement intégrée. J’ai eu pas mal de temps de jeu par rapport à la blessure de Sarah lors de ma deuxième année (saison 2015-2016) et j’ai eu la chance de jouer la Coupe. Au cours de mes années lyonnaises, j’ai connu aussi l’équipe de France, quelque chose que j’ai toujours voulu et qui s’est abouti avec Lyon.

Méline Gerard
Méline Gérard célébrant un titre avec le club lyonnais (Source : OL.fr)

“Tu es en concurrence avec la numéro 1 française, voire numéro 1 mondiale”

Tu vas garnir ton armoire à trophées en remportant 3 titres de championne de France, 3 coupes de France et 2 Ligues des Champions Féminines. J’imagine que c’est une fierté d’avoir remporté autant de titres…

Oui et non. En toute honnêteté, je suis très contente d’avoir gagné tous ces trophées, mais quand tu n’es pas titulaire, ce n’est pas la même émotion que lorsque tu es numéro 2. À Sainté, j’étais titulaire quand j’ai gagné la Coupe même si c’était un hold up (rires). À Lyon, tu dois gagner le championnat, la Coupe de France, la Ligue des Champions. Je suis fière d’avoir gagné tous ces trophées et contente d’avoir connu ça dans ma carrière. En terme d’émotions et de sensations personnelles, ce n’est pas comme si j’avais été titulaire et que j’avais une grande part de responsabilité dans tout ça. C’est une fierté d’avoir gagné tous ces trophées avec l’OL mais quand tu joues à Lyon, c’est normal de gagner.

Ton dernier match avec l’OL, c’est la finale de la Coupe de France 2017 où tu arrêtes un tir au but lors d’une séance au suspense insoutenable. Quels sont tes souvenirs de ce match ?

C’était ma dernière année et ils m’avaient laissé jouer toute la Coupe de France. J’ai vécu plus d’émotions car j’ai joué toute la compétition. J’en garde un très bon souvenir comme mes trois saisons à Lyon. J’ai fait de très belles rencontres sur le plan footballistique mais aussi sur le plan humain, surtout sur le plan humain !

Comment ça se passe quand on côtoie et qu’on s’entraîne avec Sarah Bouhaddi au quotidien ?

Honnêtement, ce n’est pas facile car tu te retrouves en concurrence avec la numéro 1 française, voire la numéro 1 mondiale. Sarah a du caractère et en impose footballistiquement. J’ai énormément appris de la joueuse. Je ne pourrais pas te dire si elle a appris de moi, il faudrait lui poser la question (rires). Personnellement, la joueuse m’a beaucoup apporté.

En plus de garnir ton armoire à trophées avec Lyon, tu découvres l’Equipe de France avec une première convocation en juin 2014. Tu te te souviens de ce moment ?

Je ne me souviens pas de ma première convocation, mais je me souviens de ma première sélection. Pour ma première convocation, je jouais à Sainté et on m’avait appelé pour un stage avant l’Euro. À chaque fois que j’étais convoquée, je ressentais une joie immense et pour ma première sélection j’ai ressentie une fierté incommensurable.

Comment abordes-tu ta première sélection ? Etais-tu au courant avant la rencontre ?

Je l’ai su avant car Monsieur Bergeroo avait discuté avec Jean-Michel Aulas qui m’en avait parlé, ou du moins me l’avait sous-entendu après un match de Ligue des Champions. Je l’attendais, enfin je l’espérais, car tant qu’il n’a pas mis ta tête sur le diapo tu ne le sais pas (rires). Quand c’était officiel, j’ai eu du stress et puis, sur le moment, un plaisir incroyable. Ma première sélection, c’était un match de l’Algarve Cup contre le Portugal.

Avec les Bleues, tu comptes 14 sélections et tu participes à la Coupe du Monde 2015 ainsi qu’aux Jeux Olympiques 2016. Que retiens-tu de ces différentes expériences sous le maillot tricolore ?

Que du positif ! Quand tu joues au foot, ton rêve ultime c’est de jouer en équipe nationale, de faire des Coupe du Monde, des Euro, des JO… J’en ai pris plein les yeux ! J’ai essayé de profiter de chaque moment et j’ai énormément appris. J’ai eu la chance de vivre une Coupe du Monde, un Euro et des JO. J’ai eu le temps de profiter même si ça m’a paru très très court. J’en suis sortie (de l’équipe de France) mais quand j’y étais, j’étais consciente de la chance que j’avais. J’ai profité à 100 % de chaque moment, de chaque sélection, de chaque stage.

As-tu toujours dans le coin de la tête l’équipe A ?

Quand j’ai eu ma lésion à Montpellier et que j’ai eu des années compliquées par la suite, c’est quelque chose que j’ai enlevé de mon esprit. Depuis l’année dernière, j’y repense énormément car tout simplement, je n’ai jamais été à ce niveau de toute ma carrière ! En Espagne, je n’ai pas retrouvé mon niveau, je suis encore à un niveau supérieur de tout ce que j’ai été durant ma carrière. Ce n’est plus une obsession comme avant, mais je pense que tout footballeur qui est performant peut prétendre à l’équipe de France.


À suivre…
Retrouvez la deuxième partie de l’interview de Méline Gérard demain, sur Main Opposée.


Photo de couverture : Twitter Real Madrid

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