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9 May 2019


La parole du meilleur gardien de la Coupe du Monde 2014 se fait rare. Actuellement sans club suite à la rupture de son contrat avec le LOSC fin août 2018, le gardien ayant la 2ème plus longue période d’invincibilité en Ligue 1 a accepté d’évoquer, en exclusivité pour Main Opposée, son envie de rejouer, sa carrière et sa conception du métier. Inspirant.

Main opposée : Bonjour Vincent. D’abord, comment vas-tu ?

Vincent Enyeama : Je me sens bien. Je suis levé tous les jours pour m’entraîner à 9h du matin. Je garde la routine d’entraînement que j’ai eu lors de ma carrière à base de gainage et de renforcement musculaire. Je suis aussi heureux d’avoir eu cette année sabbatique pour passer du temps avec mes enfants. Quand tu es footballeur, tu es libre la semaine mais ils sont à l’école. Le week-end tu es pris par les déplacements alors qu’ils sont libres. Là je peux vraiment en profiter.

MO : Nous avons vu que tu allais beaucoup à la salle et que  travaillais tes gammes dans ton jardin. Penses-tu encore pouvoir revenir après deux ans sans jouer ?

VE : Avec l’expérience que j’ai, le football c’est dans la tête. Si tu gardes la santé, le poids et les muscles, le reste suit. Je n’ai pas de problème avec ça. Je pense encore avoir 3 ou 4 ans à donner au football, tout simplement car je suis amoureux du football. Je veux rejouer, je ne pense pas encore à ma reconversion.

Entrainement à la maison - Photo : Twitter
L’entrainement continue même à la maison – Photo : Twitter @vinpee

MO : Quel projet te motiverait ? Être numéro 1 bis dans un club comme Buffon au PSG ?

VE : Je veux d’abord jouer et pour une bonne équipe. La Ligue 1 reste ma priorité pour rester près de ma famille qui est à Lille, mais je n’ai pas de projet défini à ce stade. Je prendrai les choses comme elles viennent en étudiant bien le projet du club et l’équipe.

MO : La blessure début 2017, le loft lillois en 2018, une année blanche cette année… comment garde-t-on la foi dans le football après ces deux années et demi de galère ?

VE : La dernière année à Lille a été difficile. Mais la vie est faite de hauts et de bas, il faut être patient. C’est la motivation et l’amour du foot qui m’a fait tenir.

MO : Durant ta carrière, tu as joué au Nigéria, en Israël et en France : trois championnats et cultures très différents. Quelles sont les différences principales entre ces cultures d’entraînement ?

VE : Je dirais qu’au Nigéria et en Israël, le focus étaient les appuis rapides et les 1 contre 1. A l’inverse, en France, j’ai d’avantage travaillé les plongeons et tout ce qui concerne le haut du corps. Mais dans les 3 championnats, ce qui compte c’est de garder son éthique de travail. C’est cette éthique qui m’a permis de m’imposer quelle que soit la culture.

MO :  Tu as gagné tes titres les plus prestigieux vers la fin de ta carrière (CAN 2013, meilleur gardien de la Coupe du Monde 2014). Es-tu vraiment meilleur qu’à tes débuts ?

VE : Non, je pense que je suis resté le même au fil des années. Je n’ai jamais pris plus de 38 buts dans un championnat (moins d’un but par match). J’ai eu 3 fois le titre de meilleur gardien en Israël, dont 1 de meilleur joueur ! Donc je pense avoir gardé un niveau constant au long de ma carrière. J’étais le même gardien.

MO : D’avoir été meilleur gardien de la coupe du monde et d’avoir établi le second record d’invincibilité en championnat de France doit te rendre fier…

VE : Comme je l’ai dit à l’époque, je m’en fiche d’avoir eu ces records ou d’avoir été le meilleur gardien. Ce sont juste des statistiques. Je pense qu’il faut le fêter, le célébrer, car c’est bien d’être le héros. Cependant il faut avancer et ne plus y penser. Le plus important restera toujours le prochain match ou la prochaine action. Sur le prochain but encaissé, personne ne se souviendra que tu as été le héros avant.

Le respect entre le meilleur joueur et le meilleur gardien de la Coupe Du Monde 2014 - Photo : AFP
Le respect entre le meilleur joueur et le meilleur gardien de la Coupe Du Monde 2014 – Photo : AFP

MO : Ce qui impressionne chez toi, c’est ta capacité à toujours être dans le rythme de l’action lorsque tu interviens sur un plongeon ou une sortie. Comment l’as-tu travaillé ?

VE : La clé, c’est de réussir à rester calme et de garder son sang-froid sur chaque action. Donc il y a une partie liée à mon caractère, mais il y a surtout beaucoup d’exercices pour rester calme.

MO : Tu as avez aussi une image de gardien proche de sa défense. Quelle est la clé pour créer cette alchimie avec ses défenseurs ?

VE : Tout d’abord, je n’étais proche de personne en particulier, mais de tout le monde. Une équipe pour moi forme un tout dans lequel il faut s’intégrer. Après c’est comme dans tout business, c’est important d’avoir de bonnes relations en dehors du terrain. Des dîners avec les familles, en apprendre sur la vie de chacun… tout cela contribue à cette cohésion.

MO : Autre particularité que l’on connaît peu, en Israël tu tirais les penaltys de ton équipe. Pourquoi ?

VE : L’équipe était mal classée et nous venions de louper beaucoup de penaltys. Il y avait un réel problème de confiance. Du coup, j’ai proposé de les tirer car j’avais confiance en moi et je suis quelqu’un qui garde son sang-froid. C’était fun.

MO : C’était qui ton idole du coup ? Chilavert ?

VE : Non, c’était Van Der Sar ! Je l’appréciais d’abord car il gardait toujours son calme. Il ne s’énervait jamais. Ensuite il avait surtout un superbe jeu aux pieds. Il était vraiment inspirant et il a duré jusqu’à 41 ans.

MO : Comment t’est venue la vocation d’être gardien de but ?

VE : D’abord j’ai toujours été gardien de but, j’aimais ça. En vérité, je suis devenu gardien car j’étais celui qui aimait plonger dans le sable. Et oui, contrairement à l’Europe, la plupart des terrains au Nigéria ou dans le reste de Afrique sont en sable. On doit constamment s’adapter, que ce soit aux rebonds ou aux conditions d’entrainement.

MO : En tant qu’ex-Super Eagle, penses-tu que le Nigéria peut gagner la CAN ?

VE : Oui car quand on commence une compétition, on y va toujours pour gagner. L’équipe peut aller loin car je pense qu’ils ont un groupe à leur portée. J’y crois.

MO : Hors football, il y a quelques semaines Notre-Dame a connu un gros incendie. En tant que croyant, qu’est-ce que cela t’a fait ? 

VE : Je pense que dans le monde, il y a toujours des mauvaises ou des bonnes choses qui arrivent. Je me suis senti mal en voyant les images. Mais des catastrophes, il y en a tous les jours et partout dans le monde. Le plus important c’est de profiter des bons moments et d’avancer.

MO : Un dernier mot pour les lecteurs de MO ?

VE : Si vous voulez devenir un champion, un winner, les choses les plus importantes sont : le travail, la confiance et surtout l’envie de s’entraîner.


photo de couverture : Lyonne.fr

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