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19 January 2022


MO Rétro, c’est votre nouvelle série où la rédaction vous propose de revenir sur des événements qui ont impacté le poste. Nouvelles règles, anecdotes insolites, mode, le gardien de but a dû composer avec l’évolution. Premier épisode consacré à la protection des derniers remparts dans l’histoire du ballon rond.

Séville 1982, Harald Schumacher percute violemment Battiston. Une sortie traumatisante pour toute une génération. Si sur cette action le portier allemand est “l’agresseur”, dans l’histoire du football, les gardiens ont souvent été victimes de charges plus ou moins violentes.

Au fil de l’évolution des règles du football, les instances vont fixer un certain nombre de règles pour promouvoir un football plus offensif favorisant le spectacle. Certains gestes désormais illicites sur le rectangle vert étaient autorisés lors des premières heures du ballon rond.

Le gardien une cible en plein envol

A la fin du 19ème siècle, le quotidien du gardien de but dans ses cages pouvait s’apparenter à celui de toréador. Les joueurs adversaires briguaient le rôle du taureau, pourtant le dernier rempart ne portait pas de maillot rouge.

A cette époque, les joueurs pouvaient faire tomber le gardien de but quand le cuir était à proximité de la cage notamment dans les 5 mètres 50. Très appréciée par les footballeurs britanniques, cette pratique fragilisait les interventions du numéro 1. Pas très joli mais “tout ce qui n’est pas interdit est autorisé”. Pour mettre fin à ces situations litigeuses, une règle en 1893 n’autorise plus les joueurs à faire tomber le gardien de but. Une décision incompréhensible pour les ancêtres de Joey Barton.

Dans les airs, les gardiens de but étaient vulnérables. Tactiquement, leurs coéquipiers n’étaient pas aussi rodés pour les protéger tandis qu’ils étaient des cibles permanentes. En 1897, le Board (International Football Association Board, ndlr), institution qui régit les lois du jeu, décide que les portiers peuvent être chargés quand ils possèdent le ballon.

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Jan Van Beveren, gardien historique du PSV Eindhoven dans les années 70 s’interpose dans les airs. (Photo : Wikipédia)

Il était donc possible de marquer des buts en chargeant le gardien de but. Une règle utilisée à des fins stratégiques par certaines équipes, à l’instar de l’équipe de France qui inscrit sept buts de la sorte entre 1907 et 1914. Lors d’une victoire contre l’équipe de France en 1927 (4-1), Ricardo Zamora, légendaire gardien espagnol, perdit deux dents après un choc avec Jean Boyer. Un duel au cours duquel l’attaquant des Bleus expédia le ballon au fond des filets !

Imaginez Nico Pallois en voltigeur charger Anthony Lopes pour propulser le gardien lyonnais et le ballon au fond des filets. Outre la réaction d’un certain Jean-Michel du Rhône, aujourd’hui ce genre de situation provoquerait à juste titre un tollé.

La charge sur le gardien de but, une norme culturelle

La règle de la charge du gardien de but est toujours en vigueur au XXème siècle mais sa “non-application” va faire disparaître cette loi du jeu de l’imaginaire collectif.

Au fil des années, les acteurs du jeu ont compris l’importance du gardien de but, notamment son caractère irremplaçable dans la poursuite du jeu. Les arbitres font de cette charge contre le portier un droit de moins en moins permissif, considérant le gardien comme un joueur plus vulnérable que les autres.

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Longtemps en vigueur, la règle de la charge du gardien de but s’est éteinte par sa non application. Pour le plus grand bonheur, de Fabien Barthez contre le Portugal en 2006. (Photo : Sofoot)

Si en 1962 le Board refuse une proposition de la fédération écossaise interdisant tout contact avec le gardien de but dans la surface, les dirigeants, joueurs et spectateurs considèrent de facto la protection du dernier rempart indispensable, même si chaque région du monde interprète cette règle selon ses mœurs. Comme le constate l’historien Alfred Wahl, toucher le gardien de but qui joue le ballon est impossible dans les pays latins et en Amérique du Sud, mais toléré en Grande-Bretagne.

A l’instar de ses prérogatives sur un terrain, le rapport du gardien avec autrui a également changé. L’évolution des règles et codes footballistiques impactant directement le ou la numéro 1 sont la manifestation d’un plus grand respect des acteurs envers le poste. Le gardien n’est plus un joueur comme un autre, mais plutôt un joueur pas comme les autres. En somme, un joueur unique.


photo de couverture : Wikipedia

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